• Lettre à mon violeur, l'heure est venue pour vous.

     

     

     

     

     

    Le deuil ne vous laisse que des pantoufles à côté d'un lit.

    - Allo?

    - Il est mort..

    - Qui donc??

    - Celui qui meurt chaque semaine.

     

    Cette année on m'annonce une fois par mois le décès d'une personne, membre de ma famille ou de celle d'un ami. Ce qui reste bizarre, c'est de n'avoir pleuré que deux fois: pour quelqu'un que je n'ai jamais connu, et un autre que j'ai tué.

     

    C'est toujours amère de faire un deuil. Mais moi je suis heureuse pour le mien, mon deuil construit, mon prémédité et inattendu.

    J'ai tué mon souilleur, mon irrespectueux, le primitif, le bestial, le monstre et je sourie encore. Un criminel porte ses morts sur la peau et s'en réjouit.

    Je te dédie ce verbe: profaner.

    Mais je t'excuse, peut-être que c'est de ma faute, peut-être que je ne t'ai pas crié assez fort de t'arrêter, peut-être que j'aurai du m'habiller, me coiffer et parler autrement? Si ça se trouve, tu ne savais pas que sur moi, tu accomplissais avec force le verbe abuser? Toi le compréhensif, l'homme artiste, le lettré.

    Je te descends avec tes armes: les mots, pour que tu puisses crever en apostrophe. Les mots restent l'arme la plus destructive pour chaque individu ayant un semblant de réflexion.

     

    (Abjurer, abuser, apostasier, déflorer, contrevenir, contraindre)

     

    Je te fais aujourd'hui victime sans te toucher, sans te forcer, sans te chuchoter de te taire. Je suis l'appel de la vérité, tous les mots que tu écris, tous les livres que tu lis, je suis ta plume et ton clavier, chaque phrase est mienne. Je suis femme de Camus et sœur de Sénac. Je suis fille de ma mère.

    "On écrit pour tuer", je t'écris au nom de toutes les femmes qui n'ont su écrire, toutes celles que l'alphabet a effrayé, que les virgules ont frappé, que le silence a dompté. Tu viens de passer de vie à trépas et tu le ressentiras encore toutes les fois où tu fermeras tes yeux en pensant à moi.

     

    irrévérencieux

     

    Ta cérémonie mortuaire ne fait que commencer et consciente de ta perte j'ai choisi de te célébrer.

    Je te promets des veillées nocturnes aux lumières feutrées, des paroles folles, s’accordant à la perversion de tes gestes.

    (Frustre, rustre, impoli, béotien, mufle, malotru ,incorrect, inconvenant, irrespectueux, frustré)

     

     

     

    Jamais le silence.

     

     

     

     

    « Belles tournures Downtown »

  • Commentaires

    1
    Ton violeur
    Mardi 12 Août 2014 à 03:19

    Pourquoi? Pourquoi des mots aussi dur? Tu me trensperce l'âme :( je regrette mon geste, c'est vrai, mais je t'avoue que c'était trop bon  :o

    2
    naw
    Mercredi 13 Août 2014 à 22:51

    Ce texte est bouleversant et courageux... le commentaire plus haut est de très mauvais goût, imbécile, pour ne pas dire plus.  Bravo Yasmine.

    3
    Jeudi 14 Août 2014 à 00:30

    Je ne pense pas que le commentaire plus haut voulait être méchant ! Merci Naw :)

     

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